ISO 45001 : Consultation et Participation des Travailleurs

Préserver la santé et garantir la sécurité du personnel est un enjeu essentiel pour tout employeur. Il s’agit ici de détecter les dangers et risques potentiels inhérents à l’activité exercée sur le lieu de travail afin de mieux y remédier. En ce sens, la norme ISO 45001:2018 prévoit le renforcement de la consultation et de la participation des travailleurs dans la mise en œuvre du Système de Management de la Santé et de la Sécurité au Travail. C’est d’ailleurs l’une des principales nouveautés du texte par rapport au précédent référentiel OSHAS 18001:2007. Mais comment procéder de manière efficace et convaincante ?

L’importance d’un dialogue efficace

L’actualité 2020 nous offre la parfaite illustration du bénéfice apporté par un dialogue efficace entre la direction et le personnel dans une entreprise. Le coronavirus est passé par là, donnant une dimension nouvelle à la notion de risque professionnel et forçant de nombreuses organisations à ralentir ou cesser leurs activités. En France, le géant Amazon lui-même n’a pu résister à la pression conjointe des autorités et de ses employés.

À l’heure du déconfinement, la question se pose plus que jamais. Comment garantir la sécurité de tous dans une situation aussi complexe et inédite ? Il s’avère essentiel d’impliquer le personnel au moment de décider des mesures de prévention des risques, ainsi que le mentionne le document édité par le cabinet Arete à partir des directives gouvernementales. Il en va de la survie des travailleurs comme celle de l’entreprise…

Les exigences de l’ISO 45001

En matière de consultation et participation du personnel, les nouvelles exigences sont décrites dans le chapitre 5.4 de la norme. Nous pouvons les résumer en 3 points :

Le processus

L’organisme doit établir, exécuter et tenir à jour un processus pour la consultation et la participation des travailleurs et, le cas échéant, de leurs représentants. Cette démarche doit s’étendre à tous les niveaux et toutes les fonctions pertinentes. Elle est applicable au Système de Management de la Santé et de la Sécurité au Travail dans son ensemble et à tous les stades de son utilisation : développement, planification, mise en œuvre, évaluation des performances et mise en place d’actions d’amélioration.

Les conditions d’application

Le chapitre 5.4 fournit ensuite quelques précisions à propos des éléments qu’il convient d’intégrer dans le processus :

  • Ressources à prévoir ;
  • Informations à fournir ;
  • Obstacles à lever ;
  • Sujets sur lesquels porte l’intervention du personnel.

À retenir

Pour que le processus soit efficace, il importe que les travailleurs concernés appartiennent aux personnels non encadrants. En d’autres termes, les collaborateurs directement confrontés aux risques professionnels dans leurs conditions de travail quotidiennes. Ils doivent par ailleurs être assurés de n’encourir aucunes représailles s’ils identifient un danger ou de mauvaises pratiques.

Consultation et participation des travailleurs : exemple de processus

Depuis le 1er janvier 2020, toute entreprise de plus de 11 employés doit avoir instauré un Comité Social et Économique. Ce dernier remplace les anciennes instances représentant le personnel comme le comité d’entreprise, les délégués du personnel ou le CHSCT (Comité d’Hygiène, de Sécurité et des Conditions de Travail). L’exemple de processus détaillé ci-dessous fait donc intervenir ce CSE.

Pour décrire le processus de manière synthétique, je vous propose ce logigramme qui en reprend les points importants :

Logigramme de consultation et participation du personnel

 

La norme ISO 45001 n’impose pas de décrire la démarche comme un « processus qualité » à part entière, ainsi que demandé dans l’ISO 9001:2015. Nous pouvons cependant nous en inspirer pour mieux structurer notre approche. Le processus peut ainsi comporter :

  • Un objectif: réussir toute transformation de l’entreprise en impliquant un maximum de collaborateurs via la consultation et la participation des travailleurs. C’est cet objectif que l’on retrouve en bas du logigramme, dans la section « activités » ;
  • Des données d’entrée: ce sont les informations nécessaires à la réflexion (demande de modification, exigences réglementaires, contexte de l’entreprise, etc.) ;
  • Des données de sortie: elles formalisent l’issue de la consultation ou la participation du personnel (confirmation de la modification, compte-rendu du CSE, plan de communication, etc.) ;
  • Les responsabilités de chacun clairement déterminées pour chaque activité ;
  • Des indicateurs de surveillance ou de performance: il peut s’agir du taux de collaborateurs non encadrants participant aux groupes de travail, du nombre de consultations du personnel via le CSE, du taux de réussite des projets, etc.

En conclusion, le fait de structurer votre démarche démontre votre volonté d’associer le personnel à la mise en œuvre du Système de Management de la Santé et de la Sécurité au Travail. Plutôt qu’une approche brouillonne et des actions ponctuelles sans objectif réel, vous adoptez un processus efficace permettant d’optimiser la consultation et la participation des travailleurs dans le quotidien de l’entreprise.

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Ecoute des parties prenantes

Dans la newsletter précédente, nous avons vu que depuis 2015 avec la nouvelle structure commune HLS, toutes les normes ISO (ISO 9001 :2015, ISO 14001 :2015, ISO 45001 :2018, ISO 50001 :2018) prenaient en compte les enjeux internes et externes de l’entreprise. Autrement dit, les facteurs impactant la capacité de l’organisation à atteindre ses objectifs QSE. Pour déterminer ces enjeux, il est utile d’élaborer le plan stratégique de l’entreprise. Cela commence par la collecte d’informations, et notamment la surveillance et l’analyse du contexte externe. Intéressons-nous maintenant au point suivant : la cartographie et l’écoute des parties prenantes.

Identification des parties prenantes pertinentes.

Pour procéder à l’écoute des parties prenantes, encore faut-il les identifier.

Ces dernières ont des intérêts variés vis-à-vis de l’entreprise. Ils peuvent être semblables à ceux de l’organisation : l’activité d’une entreprise crée des emplois, ce qui plaît aux riverains. Mais ceux-ci peuvent aussi se plaindre de nuisances sonores. Leurs intérêts deviennent alors concurrents voire conflictuels avec ceux de l’organisation. Enfin, un problème peut concerner toutes les parties : une source de pollution par exemple dessert l’entreprise comme le propriétaire foncier voisin, dont le bien perd de sa valeur initiale.

Les intérêts des parties prenantes sont repris dans la démarche RSE (Responsabilité Sociétale des Entreprises). La norme ISO 26000 en donne les lignes directrices et propose les questions suivantes pour dresser une liste des parties intéressées et parties prenantes pertinentes :

  • Envers qui l’organisation a-t-elle des obligations légales ?
  • Qui pourrait être impacté positivement ou négativement par les décisions ou les activités de l’entreprise ?
  • Qui est susceptible de s’en inquiéter ?
  • Quelles personnes ou entités se sont trouvées impliquées, dans le passé, lorsqu’il a fallu aborder de semblables préoccupations ?
  • Qui peut aider l’organisation à traiter certains impacts spécifiques ?
  • Qui peut influer sur sa capacité à s’acquitter de ses responsabilités ?
  • Certains peuvent-ils être désavantagés en étant exclus du dialogue ?
  • Enfin, qui est touché dans la chaîne de valeur ?

« Qui parle sème. Qui écoute récolte. » Proverbe persan

 

Analyse des besoins et attentes des parties prenantes pertinentes

Peut-être avez-vous déjà eu l’occasion d’utiliser le modèle de Kano ? C’est un outil efficace pour évaluer avec précision la satisfaction ou l’insatisfaction des clients. Ce modèle peut également être appliqué à toutes les parties prenantes de l’entreprise.

Diagramme de Kano
Diagramme de Kano pour évaluer le degré de satisfaction des clients

Il est alors possible d’identifier, parmi leurs besoins et attentes, ce qui est de l’ordre de :

  • L’obligatoire, l’indispensable 

Exemple : le respect de la réglementation ;

  • L’attractif, l’attirant, le ravissement 

Exemple : la direction invite la communauté locale à visiter l’usine pour fêter ses 10 ans d’implantation ;

  • La performance proportionnelle ou linéaire

Exemple : un fournisseur voir son propre volume de vente progresser chaque année, de façon continue et en même temps que celui de l’entreprise ;

  • L’instable à double tranchant

Exemple : un client reçoit la marchandise commandée une semaine avant le délai prévu. Cela peut constituer une bonne surprise, ou au contraire être pénalisant (capacité de stockage insuffisante).

Organisation de la collecte d’informations

Tous impliqués

L’écoute des parties prenantes doit devenir l’affaire de tous. La collecte d’informations passe en effet par la formation et la responsabilisation de tous les managers et collaborateurs.

Chaque contact avec l’extérieur peut être utile, et ce quelle que soit sa nature. Il est donc important que chacun écoute, observe et dialogue avec les parties prenantes puis remonte les informations et données collectées.

Pour que ce schéma fonctionne, il est nécessaire de mettre en place des outils adaptés ainsi qu’un système de reconnaissance récompensant les efforts consentis. Il faut également déterminer les canaux de collecte, d’écoute et d’observation. Cette étape facilitera la qualification des données par croisement et association, ainsi que la détection des signaux faibles et des informations non pertinentes. On veillera enfin à tenir à jour la base de connaissances collectives ainsi constituée.

Ecoute des parties prenantes : satisfaction clients
Ecoute des parties prenantes : évaluer la satisfaction des clients

Les différents canaux d’écoute

On peut classer les canaux d’écoute en fonction des familles de porteurs d’enjeux :

  • Les clients: leur écoute et la mesure de leur satisfaction faisaient déjà partie des exigences de la norme ISO 9001 :2008. On peut aujourd’hui renforcer ces aspects grâce à des approches méthodologiques. Nous avons déjà cité Noriaki Kano et son modèle concernant les besoins et les attentes des clients. Mentionnons également Shoji Shiba, expert du management par la qualité, et son livre « Conception à l’écoute du marché » ;
  • Les partenaires et les fournisseurs: les contacts lors de la phase de mise au point ou de revue de contrat, les contacts au sein des processus partagés, la presse sont autant d’opportunités susceptibles d’alimenter la collecte d’informations ;
  • Les collaborateurs: l’entreprise peut cerner leurs attentes à l’occasion des entretiens annuels, des enquêtes de satisfaction du personnel, de la représentation syndicale, etc. ;
  • La société et la collectivité: le spectre est large, allant des voisins au régulateur. La gestion des réclamations du voisinage (exigence de l’ISO 14001 :2015), les rencontres avec les élus ou les demandes de sponsoring sont, par exemple, des sources d’information très riches ;
  • Les souverains: il s’agit de personnes ou d’organisations comme les actionnaires, les propriétaires, la préfecture. Les canaux de collecte sont nombreux : courriers et visites des autorités (inspection du travail, DREAL), assemblées générales, etc. Il convient de structurer les informations recueillies de manière à pouvoir retrouver facilement l’historique des relations avec ces entités.

Pour conclure, le processus d’écoute des parties prenantes n’est pas nouveau. La version 2015 des normes ISO 9001 et 14001 et la version 2018 des normes ISO 45001 et ISO 50001 ne font qu’en élargir le périmètre. Comment mesurer la réussite de l’exercice ? Il s’agira d’évaluer la qualité des plans d’action décidés par l’entreprise suite à cette collecte d’informations stratégiques. Et de sa capacité à poursuivre la démarche sur le long terme. Nous examinerons bientôt les autres aspects de la collecte, comme l’observation des concurrents ou la prise en compte du contexte interne et des capacités de l’entreprise. Pour ne manquer aucune newsletter, inscrivez-vous !